« Perte de crédibilité », déploiement insuffisant : l’Igas propose de supprimer l’agence nationale du DPC

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Publié le 13/03/2025
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Deux rapports de l’Igas sur l’agence nationale du développement professionnel continu (ANDPC) pointent le bilan décevant du pilotage du dispositif. Les experts suggèrent une harmonisation avec la certification périodique et avancent des recommandations décoiffantes dont la suppression de cette agence et le transfert de ses moyens à la HAS ! Sans oublier la fin de l’obligation de DPC pour les professions à Ordre…

Crédit photo : Garo/phanie

Nouveau coup dur pour l’agence nationale du DPC (ANDPC). Après le réquisitoire de la Cour des comptes, c’est au tour de l’Igas d’épingler le pilote stratégique et financier du développement professionnel continu. L’avenir de cet opérateur, créé en 2012 sous forme de groupement d’intérêt public (GIP) partagé entre l’État et l’Assurance-maladie, est donc plus que jamais incertain.

Chargée de la définition du DPC, de la fixation de ses orientations, du suivi de cette obligation pour l’ensemble des professionnels de santé (environ 1,9 million de personnes) et du financement (pour les seuls libéraux et les salariés des centres de santé – soit environ 453 800 personnes), l’agence affiche un bilan mitigé, voire franchement décevant.

Déploiement insuffisant

Selon l’Igas, le déploiement du DPC se révèle en effet « très en deçà des ambitions affichées », en raison de « l’absence de leviers » pour inciter les professionnels à suivre des actions et les accompagner dans cette démarche. L'agence « n'a pas su accompagner la généralisation », résume l’Igas. Sur la période 2020-2022, la part de professionnels ayant validé leur obligation triennale s’élève à environ 100 000 professionnels parmi les 453 800 éligibles, soit 22 % de la cible.

Pour expliquer ce médiocre résultat, la mission souligne le « cumul de contraintes imposées par l’ANDPC ». À cause d’une enveloppe fermée versée par l’Assurance-maladie, l’agence doit en réguler la consommation « en contingentant la demande par des orientations prioritaires éloignées des préoccupations de professionnels ».

Par ailleurs, elle a dû agir sur l’offre de formation par « une procédure lourde d’enregistrement des organismes et de validation a priori des actions ». Conséquence : « Des effets pervers avec un faible intérêt des professionnels et des découragements des organismes hormis les plus lucratifs et les mieux armés pour gérer les barrières à l’entrée. »

Pour autant, l’agence bénéficie de « moyens non négligeables qui auraient pu être mis au service d’améliorations qu’elle a tenté de porter » ; mais confrontée au manque de résultats, cette situation place le pilote du dispositif dans « une position de perte de crédibilité durable ».

DPC et certification périodique ? Deux dispositifs au milieu du gué

L’arrivée en 2023 de la certification périodique, applicable aux sept professions à Ordre, nécessite de « reconsidérer la position du DPC », selon l’Igas - la certification reposant sur un principe plus large. Las, ce nouveau dispositif, articulé autour de référentiels des actions de certification périodique, n’est lui-même pas encore « abouti », faute de définition claire du niveau d’exigence ou de retards « majeurs ».

Il en résulte en tout cas, selon l’Igas, un paysage illisible et éclaté, d’autant ces deux systèmes de maintien et d’amélioration des compétences sont « au milieu du gué ». Aux yeux des inspecteurs, il est nécessaire de consolider les bases communes qui doivent « constituer les conditions de fonctionnement du DPC et de la certification périodique ».

Plusieurs pistes fortes sont avancées. La première consiste à supprimer carrément l'obligation de DPC pour les professions à Ordre (puisqu’une certification périodique efficace fera l’affaire). Sous réserve d'aménagements, cette contrainte de DPC pourrait être maintenue pour les professions sans Ordre. L’Igas suggère surtout de « rationaliser » les deux dispositifs en alignant les durées des cycles de certification périodique, de DPC et d'accréditation des spécialités à risques « sur une durée de six ans ».

Label commun et pilotage intégré

Cette consolidation passe aussi par « une harmonisation » des outils de régulation autour d'un nombre restreint d'orientations de santé publique. Un « label commun » devrait être créé pour l’agrément des organismes dans le cadre des deux dispositifs.

Outre ce socle commun, le rapport réclame un pilotage intégré de la certification périodique et du DPC, qui exclut le maintien de l’agence nationale en l’état… Avec trois scenarii possibles : la transformation de l’agence du DPC « en établissement public » ; le transfert des moyens et compétences de l’agence à un « service à compétence nationale rattaché au ministre de la Santé » ; ou la suppression de l’agence avec transfert des compétences, du pilotage et des moyens à la HAS. Pour l’Igas, cette dernière solution radicale serait la plus adaptée « dans l'objectif d'une cohérence entre les missions déjà exercées par la HAS et les objectifs du DPC et de la certification périodique ». De surcroît, la suppression d’une agence contribuerait à diminuer le nombre des opérateurs de l’État, glisse la mission.

L’Igas suggère des arbitrages dès cette année. Et par pragmatisme, elle recommande le report de la date initiale du début de l’obligation de certification périodique, officiellement en vigueur depuis janvier 2023.


Source : lequotidiendumedecin.fr