Bien soigner les patients tout en veillant sur la planète, c’est le pari lancé par le centre hospitalier de Niort. Et celui-ci s’avère gagnant puisque l’établissement a été distingué, en décembre dernier, par le Prix de la décarbonation de l’action publique 2024, aux côtés des CHU de Bordeaux et de Poitiers. Une récompense qui salue non seulement le projet « Cap hôpital durable » mené en équipe par les trois hôpitaux en coordination avec l’ARS Nouvelle-Aquitaine, mais aussi quinze années d’actions déployées par l’établissement niortais. Son succès le plus significatif : la réduction de son empreinte carbone annuelle de 45 000 à 28 000 tonnes de CO2.
Aux manettes de cette transformation écologique, Bernard Jourdain, chargé de développement durable des CH de Niort, Mauléon et Nord-Deux-Sèvres (en direction commune). « C’est le directeur de l’établissement Bruno Faulconnier, sensible aux questions environnementales, qui a impulsé le projet et m’a sollicité puisque je faisais déjà partie des murs. À l’époque, c’était assez novateur », raconte-t-il. Le « monsieur Développement durable » de l’hôpital a d’abord procédé à un état des lieux : « C’était la première étape indispensable pour savoir d’où nous partions. Nous avons alors fait un premier bilan carbone en 2010 et nous en avons refait un tous les trois ans jusqu’en 2022 », détaille-t-il.
Il ne s’agit pas de moins endormir le patient pour économiser du gaz
Bernard Jourdain, chargé de développement durable à l’hôpital de Niort
Passé le constat, place aux actions concrètes. « Très vite, nous avons changé la chaufferie pour passer du fioul au bois », expose Bernard Jourdain. La révolution écologique s’est emparée des blocs opératoires où quatre filières de tri ont été mises en place pour les cartons, les cartouches d’encre, les métaux : les blisters et les fils de bistouri. « Nous avons passé en revue les produits que nous utilisons au quotidien et identifié, parmi ceux qui sont à usage unique et donc jetables, ceux qui pourraient être remplacés par du matériel réutilisable », détaille-t-il. En chirurgie pédiatrique, les soignants restérilisent ainsi le matériel.
En anesthésie, les médecins privilégient désormais les gaz médicaux à faible empreinte carbone. « Attention, toutes ces actions sont mises en œuvre en maintenant la qualité des soins : on ne va pas moins endormir le patient juste pour économiser du gaz », insiste Bernard Jourdain. Voilà donc autant de changements loin d’être anodins pour les équipes médicales, invitées à revoir leurs habitudes pour adopter des gestes plus verts. « Il a pu y avoir des interrogations au départ mais tout s’est fait sans difficulté car aucune décision n’est prise de manière verticale. Les soignants sont aussi concertés et impliqués dans cette transformation écologique de l’hôpital », affirme Bruno Faulconnier, directeur de l’hôpital.
Les médicaments, poids lourd de l’empreinte carbone
Le CH de Niort n’entend pas s’arrêter en si bon chemin et s’appuie sur un guide élaboré par Bernard Jourdain : l’agenda 2030. Il fixe un cap en détaillant les moyens concrets pour y parvenir. « Les derniers kilomètres seront les plus durs à parcourir », anticipe-t-il. L’hôpital doit notamment s’attaquer à un poids lourd environnemental : les médicaments et dispositifs médicaux. « Ils représentent plus de 50 % du bilan carbone, devant les transports ; c’est colossal », affirme l’expert. Un résultat qui corrobore les hypothèses du Shift Project qui, dans un rapport publié en 2023 sur l’empreinte carbone du secteur de la santé en général, indiquait que 29 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) seraient liées à l’achat de médicaments, et 23 % à l’achat de dispositifs médicaux.
Pour y remédier, le chargé de développement durable songe à la déprescription : « Il y a peut-être moyen d’alléger certaines ordonnances sans dégrader la qualité des soins, avance-t-il. Et, pourquoi pas, d’identifier, dans une même classe thérapeutique, les médicaments qui semblent plus vertueux que d’autres. » Le sujet du bon usage des médicaments dépasse toutefois les murs de l’hôpital. La dernière convention médicale, négociée avec les syndicats de médecins libéraux, consacre un volet de mesures à la sobriété médicamenteuse. L’Assurance-maladie invite les praticiens à « moins prescrire pour mieux soigner ». Une incitation vue d’un bon œil par Bernard Jourdain : « En matière de médicaments, sur un territoire donné, il serait intéressant d’étudier la part des émissions de chaque acteur du système de santé, plaide-t-il. L’hôpital ne peut pas être le seul à agir sur les émissions de CO2.»
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