« QUATRE MILLIONS de patients entrent chaque jour dans une pharmacie ». Fort de ce constat énoncé par son président, le Pr Jean-Paul Chiron, l’Académie de pharmacie, entend réaffirmer les missions du pharmacien en terme de santé publique et notamment de vaccination. Un travail qu’il souhaite mener en « étroite collaboration » avec l’Académie de médecine, représentée par le Pr Pierre Brégué, infectiologue et ancien directeur du comité de vaccination.
« Les pharmaciens pourraient intervenir dans le cadre de la vaccination. Pas en première vaccination, qui est un acte médical, mais en rappel », suggère le Pr Jean-Paul Chiron. Et de sortir toutes les précautions d’usage à l’égard des médecins. « Il faut discuter avec eux des prérequis », poursuit-il.
« C’est le rôle du pharmacien d’éduquer : pour les usagers bien portants, les grands adolescents, les jeunes personnes, nous avons le devoir de savoir si leurs vaccinations sont à jour et en complément du travail des médecins, des infirmiers et des sages-femmes, le pharmacien pourrait participer à l’acte de vaccination », confirme Raphaël Moreau, président de la 5e section de l’Académie nationale de Pharmacie. Ces actes s’inscriraient dans les nouvelles missions définies par la loi Hôpital, patients, santé et territoire, avance l’Institution.
Pas d’opposition du côté de son homologue en médecine. « Cela concernerait surtout les adultes », commente le Pr Brégué, en soulignant que vacciner un enfant dans une officine relèverait d’une gageure.
Conséquence de cette nouvelle mission, l’Académie de pharmacie recommande l’adaptation du dossier pharmaceutique, via, notamment la mise en place d’un carnet de vaccination électronique, auquel aurait accès le médecin. Elle propose également le renforcement de l’enseignement sur les vaccins dans la formation initiale et continue de tous les professionnels de santé.
Obligatoire ou recommandé
S’adressant aux autorités de tutelle, l’Académie de pharmacie recommande instamment de « lever toute ambiguïté » entre vaccination obligatoire, recommandée, ou prioritaire. « Le grand public comprend "non indispensable" sous le terme recommandé, il n’y a aucune lisibilité », s’insurge le Pr Jean-Paul Chiron.
Concrètement, « nous appelons nos tutelles à se positionner pour que n’existe qu’un seul terme ».
L’Académie penche pour « obligatoire » pour les vaccinations qui rassemblent 3 conditions : lorsque l’infection constitue un problème de santé publique, que le bénéfice excède très largement les risques, et qu’on dispose d’un recul estimé suffisant. Elle réitère notamment sa demande de passage du régime recommandé à obligatoire pour le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR), cas d’école qui date de plus de 25 ans. « Quand on met le vaccin dans le calendrier vaccinal, il faut réussir les objectifs du calendrier, et pour cela, prévoir la première, et la deuxième dose, mais aussi le rattrapage. Or il y a un problème en France sur le rattrapage du ROR », pointe le Pr Brégué.
« Mais politiquement, c’est un acte difficile vu le mouvement antivaccin et le climat de suspicion qui existe », estime, pragmatique, le président Chiron. En outre, d’autres enjeux économiques se cachent derrière le régime obligatoire. « Nous avons obtenu la prise en charge à 100 % pour le ROR. Mais si on dit obligatoire, cela signifie gratuité, et, en cas d’effets indésirables, réparation » explique le Pr Brégué.
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