Soigner le cancer à Gustave Roussy : « Objectif 2040 : 80 % des patients guéris »

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Publié le 23/01/2025
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Essor de la médecine de précision, attractivité internationale, nouveau campus… Gustave Roussy fait le point sur ses avancées et ses priorités futures, en particulier pour le cancer des adultes jeunes, à l’approche de la journée mondiale de lutte contre le cancer le 4 février.

Crédit photo : CHANG MARTIN/SIPA

Résolument tourné vers l’objectif de vaincre le crabe, Gustave Roussy, le premier centre de lutte contre le cancer en Europe, mise sur la médecine de précision, de la prévention à l’après-cancer. Et parmi les défis que l’institut souhaite relever, Gustave Roussy souhaite s’attaquer au cancer des adultes jeunes (20-40 ans) et devenir un pôle d’attractivité internationale. Tels sont les objectifs que l’institut a présentés, lors d’une conférence de presse en amont de la journée mondiale de lutte contre le cancer.

Une stratégie qui prendra place dans un projet de transformation du campus à 500 millions d’euros sur leur site actuel de Villejuif. « Nous souhaitons disposer d’un lien où seront réunis le soin, la recherche et la valorisation économique », commente le Pr Fabrice Barlesi, directeur général de Gustave Roussy. « Grâce au futur bâtiment recherche, qui devrait être livré fin 2027, des chercheurs de toutes les disciplines pourront échanger les uns avec les autres facilement avec un accès à des plateformes technologiques. Nous avons l’ambition de pouvoir mener, dans nos murs, des essais de phase 2 ! »

Cancers de l’adulte jeune : la recherche s’accélère

Les cancers de l’adulte jeune ont augmenté de 79% entre 1990 et 2019 dans le monde, selon une étude parue dans The BMJ Oncology. « S’il existe des chiffres au niveau mondial, il est plus compliqué d’appréhender, en France, l’ampleur de cette hausse. Mais les données issues de Globocan rapportent déjà chez nous, entre 1998 et 2017, une hausse chez les jeunes des cancers du sein (+1,7 %), des cancers digestifs (+5,4 % pour le cancer colorectal et +4,3 % pour le cancer du pancréas) et des cancers du poumon, notamment chez les femmes. En France, en 2022, 15 000 cas de cancers de l’adulte jeune ont été recensés », précise le Pr Barlesi.

« Pour s’attaquer aux cancers de l’adulte jeune, nous avons pour objectif d’en comprendre les causes et les spécificités, d’accélérer le diagnostic précoce, de développer de nouveaux traitements et d’optimiser le parcours de soins de l’après-cancer », détaille à son tour le Pr Fabrice André, directeur de la recherche à Gustave Roussy. Ainsi, ces dernières années, l’institut a mis au point plusieurs programmes de recherche dédiés à ces cancers réunis sous l’initiative « Un cancer à 30 ans – Power for YA ». Citons la cohorte Yoda qui s’intéresse aux cancers digestifs du sujet jeune, ou d’autres projets sur le diagnostic précoce et le pronostic, tels que Fresh (biopsie liquide dans une trentaine de centres français), Interception (prévention et détection destinées aux personnes à risque, décliné au niveau régional dans une dizaine de centres) ou encore Age-Protect TNBC (prédiction du risque de cancer du sein triple négatif, de plus en plus retrouvé chez les jeunes femmes).

« Que ce soit pour les adultes jeunes ou non, il est primordial d’attraper ces cancers au plus tôt et de disposer d’outils pour les caractériser, en stratifier le risque et prédire au mieux la réponse au traitement. Nous devons également mettre au point des traitements personnalisés », ajoute le directeur de la recherche. « Il nous paraît réaliste de pouvoir guérir 80 % de patients d’ici à 2040 grâce à l'accélération des progrès technologiques et thérapeutiques. Aujourd'hui, 450 000 nouveaux cas de cancer sont diagnostiqués chaque année en France, et deux malades sur trois guérissent, contre un sur deux dans les années 1990 », poursuit le Pr Fabrice Barlesi. Pour ce faire, l’institut s’appuie sur la médecine de précision à laquelle l'IHU Prism, labellisé « Centre national de médecine de précision en oncologie », se consacre. « Les recherches menées dans le programme Prism intègrent l’intelligence artificielle et l’exploitation de jumeaux numériques », précise le Pr André.

« Nous disposons également de technologies de pointe, comme la radiothérapie interne vectorisée qui cible les cellules cancéreuses directement et qui est particulièrement intéressante dans le cancer de prostate, la radiothérapie Flash qui délivre des doses ultra-élevées en une fraction de seconde ou encore le robot Single-Port que nous recevons la semaine prochaine », détaille le Pr Barlesi. « Nous nous concentrons également sur les thérapies cellulaires comme les TILs (lymphocytes infiltrant la tumeur, NDLR) et les CAR-T cells avec des programmes comme MTI-exp ou Ice, et nous continuerons à développer notre expertise sur les anticorps conjugués ».

Une course au transfert technologique

Tout comme de nombreux autres instituts et centres de recherche, Gustave Roussy souhaite renforcer le transfert technologique avec sa filiale Gustave Roussy Transfert. Une stratégie matérialisée par la construction de bâtiments dédiés à la « valorisation économique » dans le cadre du projet de transformation du campus.

Aujourd'hui, l’institut de lutte contre le cancer est à l’origine de 563 études cliniques, dont 84 % d’essais thérapeutiques, avec plus de 5 600 de leurs patients inclus. « Tout cela répond aussi à une volonté de recruter des talents français et internationaux et d’être compétitif au niveau international, reprend Sylvain Ducroz, directeur adjoint de Gustave Roussy. En 2025, nous lancerons une nouvelle campagne de philanthropie à hauteur de 100 millions d’euros pour le financement des travaux du campus, le recrutement, la recherche et l’équipement ».


Source : lequotidiendumedecin.fr