Sortir la radiologie de la convention : les médecins spécialistes voient rouge à la lecture du rapport de l’Igas-IGF

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Publié le 17/07/2025
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Baisse de la valeur des actes CCAM, réduction du montant du forfait technique, sortie du cadre conventionnel… Pour économiser 500 millions d’euros par an, les experts de l’Igas et de l’IGF font feu de tout bois dans leur dernier rapport sur la pertinence et l’efficience des dépenses de radiologie. Furieuse, la profession prépare sa contre-attaque.

Crédit photo : RADIOLOGIE P.BROUSSE-GARO/PHANIE

Coup sur coup, ce sont plusieurs rapports publiés à la suite début juillet qui, par ricochet, devraient mettre encore mettre plus à mal, s’il en était besoin, les relations entre les médecins libéraux et l’Assurance-maladie. Des relations déjà houleuses depuis l’annonce par la Cnam du report des revalorisations tarifaires de plusieurs spécialités médicales pour cause de dérapage des dépenses maladie.

Rendus publics le 15 juillet, les deux derniers rapports de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l’inspection générale des finances (IGF) sur « la pertinence et l’efficience des dépenses » de radiologie et de biologie médicale ont définitivement mis le feu aux poudres.

Du côté des 5 300 radiologues libéraux, indiquent les experts, les dépenses d’Assurance-maladie ont atteint 3,8 milliards d’euros en 2024, soit une hausse de 22 % depuis 2019, dont 2,1 milliards au titre des actes et 1,7 milliard au titre des forfaits techniques. Quant au bilan de la maîtrise médicalisée, censé freiner ces dépenses, les inspecteurs le jugent « mitigé, malgré de nombreuses recommandations de bonnes pratiques de la Haute Autorité de santé ».

Un rapport « délirant » pour la profession

La solution préconisée par les auteurs de l’étude ? Elle est draconienne. Après avoir rappelé que les émoluments des radiologues représentent presque le double de ceux de la moyenne des médecins libéraux et que leur rémunération est plus élevée de 38 % par rapport à la moyenne des spécialistes, le rapport propose ni plus ni moins de réguler les prix par une convergence de la rémunération de cette spécialité vers la moyenne des spécialistes libéraux. Quatre leviers d’action sont prisés : la baisse de la valeur des actes CCAM ; la réduction du montant du forfait technique ; la limitation de l’accès au secteur 2 « pour éviter la hausse des dépassements d’honoraires ». Et enfin, « sortir la radiologie du cadre conventionnel » et « doter l’Uncam d’un pouvoir unilatéral d’évolution de la nomenclature des équipements matériels lourds (EML) et des forfaits techniques ».

La mission estime à 500 millions d’euros par an le montant des économies potentielles qui pourraient ainsi être générées par la mise en place de ces actions. Bien au-delà des 300 millions demandés au secteur par le gouvernement sur l'imagerie médicale d'ici à 2027.

« Ce rapport est totalement à charge et délirant, fulmine le Dr Jean-Philippe Masson, président de la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR). Le truc le plus énorme, c’est que les membres de cette mission demandent à faire sortir la radiologie et l’imagerie de la convention. Cela revient à casser la convention. »

Il n’est pas le seul à le penser. Pour la Dr Sophie Bauer, présidente du SML, « ce rapport est une aberration ». Son syndicat soutient la réponse musclée que prépare la FNMR aux préconisations de la mission Igas-IGF.

« De quel droit pourrait-on faire sortir des médecins d’une convention qu’ils ont signé, à moins d’être dans une dictature façon Corée du Nord ?, s’insurge encore le Dr Masson. D’autant qu’à l’arrivée, ce seraient les patients les premiers pénalisés puisque c’est bien ce système conventionnel qui leur permet d’être remboursés de leurs soins médicaux. »

Biologie : donner à la Cnam un pouvoir unilatéral sur les prix

Portée à 55 % par les laboratoires de ville, la biologie médicale représente un marché de dix milliards d’euros, dont huit milliards d’euros de dépenses publiques. Or l’analyse de la rentabilité des laboratoires ouvre selon les experts de l’Igas et de l’IGF « un fort potentiel d’économies pour l’Assurance-maladie sans baisse du niveau de protection de l’assuré ».

Dès lors, la mission propose « à défaut d’accord conventionnel, (de) doter l’Uncam d’un pouvoir unilatéral de fixation des prix ». Elle suggère aussi de « sortir des accords prix-volume pour ramener le secteur de la biologie à un juste prix « qui se traduirait par une rentabilité opérationnelle du secteur à un niveau plus raisonnable ». Enfin, les experts estiment bon de « simplifier la réglementation, permettant de nouvelles marges de productivité aux laboratoires, sous conditions d’objectifs de résultats en termes de délais de rendu des résultats et d’accessibilité de l’offre ».


Source : lequotidiendumedecin.fr